En février 1936, l'Espagne porte au pouvoir une coalition de Front populaire, alliance de républicains de gauche et d'organisations syndicales. Dès juillet, l'armée, hostile au gouvernement légal, tente de le renverser. Sous la houlette de Franco, quelque quarante mille hommes cantonnés au Maroc espagnol cherchent à rallier Madrid par le détroit de Gibraltar. Face au coup de force, la population s'arme, le pronunciamiento échoue. Mais un tiers du territoire espagnol est désormais sous la férule des félons. C'est le début de la guerre d'Espagne.
Morcelé, l'espace resté fidèle à la république voit l'émergence de micro-gouvernements, la multiplication de milices impulsées par les partis politiques (PC, Poum) et les syndicats (UGT, CNT) pour défaire les fascistes. La ferveur révolutionnaire tout à la collectivisation des terres, à l'occupation des usines, à la promotion des plus pauvres, s'accommode mal d'une unité de commandement. Et mal équipés, mal entraînés, sur le front, les combattants républicains ont à faire face à une armée puissante, très vite épaulée par les puissances de l'Axe. Tandis que Hitler envoie chars et avions, Mussolini fournit soixant-dix mille hommes à Franco. Un rapport de force inégal que l'URSS va finalement tenter d'inverser à partir de septembre 1936 avec la fourniture d'armement, de conseillers militaires, de membres du NKVD, la police politique de Staline. Et la création des Brigades internationales. Venus du monde entier, quelque trente-cinq mille volontaires rallient le pays pour défendre la république contre le golpe franquiste.
Formidable prouesse que ce film de cent minutes tout en archives, rarement exploitées. Fort d'un montage fluide, soutenu par un commentaire tout à la fois précis et lyrique, le documentaire dévide par le menu l'épopée d'un sacrifice. Narrant parallèlement les événements militaires, « le fossé de sang qui se creuse au coeur du camp républicain », les liquidations staliniennes, l'engagement des intellectuels et des artistes, il parvient avec maestria à faire exister la fièvre de l'époque, ses pénombres, ses illusions perdues.
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